Amritsar, c'est parti !


Nous arrivons à 13h sous une chaleur abominable et entamons la recherche d'un hôtel pour 2 nuits. Notre première tentative (le fameux Krishna Hotel) annonce la couleur : 1000 roupies pour une chambre avec clim dans une ruelle salle de la vieille ville.

Pas possible. "Not possible" pour les bilingues.

Nous sommes habitués à dormir pour 500 roupies (sans clim/mais ventilo) pour un confort identique.

Armés de Maps.me et du Lonely Planet, nous débutons notre chemin de croix. Une vingtaine d'hôtels plus tard, horrifiés par l'état des chambres proposées à 1000 roupies (cadavres de cafards géants, cuvettes de chiottes oranges, douches inutilisables, draps jaunes et tachés, etc.) nous retournons désespérés à notre point de départ et négocions nos nuits au Krishna Hotel à 700 roupies.


Ça semble simple comme ça, mais nos corps entiers ruisselaient de sueur, et, en ce qui me concerne, telle une morte vivante, cernée et luisante, j'envisageais presque de me laisser défaillir et abandonner tout honneur au milieu de la route pour que Maxime arrête de chercher de nouveaux hôtels à moins de 500 roupies !


Une bonne douche fraîche et une petite sieste nous ont remis d'aplomb. Nous nous dirigeons en fin d'après-midi dans le centre ville d'Amritsar (à quelques pas de l'hotel) pour découvrir le Harmandir Sahib ou célèbre Temple d'Or.


Nous émergeons des ruelles boueuses pour aboutir dans une immense rue piétonne entourée de bâtiments neufs et modernes où les boutiques se succèdent jusqu'aux majestueux bâtiments qui encadrent le temple.

"Disneyland", c'est ce qui nous vient à l'esprit quand nous regardons autour de nous. Toute la vieille ville à été reconstruite dans un même style surfait comme pour faire croire aux touristes qu'Amritsar est occidentalisée. Un Subway et un MacDonalds nous font face, le sol en mosaïques nous paraît trop propre. Sommes-nous dans la même ville que celle que nous avons vu de notre rickshaw le matin même, sale et désorganisée ?


Nous nous approchons de l'attraction centrale de ce village magique.


Comme le veut la coutume, nous laissons nos chaussures dans un casier avant de nous laver les mains et de nous couvrir la tête d'un foulard (distribué gratuitement à l'entrée du temple). Un pédiluve (comme à la piscine) nous permet de nous laver les pieds et nous pénétrons enfin dans ce lieu de culte, centre spirituel et culturel de la communauté Sikh.


Comment distinguer un Sikh ? Les hommes portent des turbans et se laissent pousser la barbe. Les jeunes garçons gardent une mèche de cheveux longs attachés en chignon sur le haut du crâne. Ils portent tous un bracelet en argent au poignet et, de manière générale, sont plus grands et plus costauds que le reste de la population. Les plus traditionnels vont même jusqu'à porter le sabre dans la rue - ce qui en impose pas mal ! - d'autant que leur tunique de couleur unie leur donne déjà un sacré style. Le sikhisme est une religion qui rejette le principe des castes.


Le Temple d'Or est impressionnant entouré de bâtiments splendides, au centre de son bassin. Comme à Pushkar, les pèlerins se baignent tandis que d'autres se mettent en prière. Nous observons les pratiques en effectuant notre tour de lac sur fond de coucher de soleil.

Petit à petit, les lumières s'allument sur le monument et des bougies sont placées tout autour du bassin. Le moment est apaisant, mais la foule est dense. Nous partons du lieu pour aller dîner.


Passage éclair dans une des meilleures gargotes d'Amritsar "Kesar Da Dhaba". Maxime déboule enchanté dans les cuisines où les flammes des cheminées s'élèvent haut dans la salle. L'ambiance est fantastique mais notre touriste préféré est rapidement interpellé pour se faire rediriger vers la salle à manger où le contraste de températures est brutal. La clim tourne à plein volume et malgré le repas copieux et efficace, nous fichons rapidement le camp de peur de choper la crève.


Grosse nuit de 11h. Nous allons acheter nos billets de train pour Pathankôt (sur la route du Ladakh) où nous avons prévu d'aller le lendemain. 

Le conducteur de rickshaw qui nous ramène en ville nous fait un scandale lorsque nous le payons en pièces de monnaie. Scène mémorable où le grand gaillard nous jette l'argent à la figure en hurlant des obscénités. Nous sommes sauvés par un bon samaritain (ces Sikhs sont vraiment adorables).


Notre souhait est maintenant de trouver un taxi public pour faire la route jusqu'à Wagah, pour assister à la cérémonie de fermeture des frontières avec le Pakistan.

Un gars nous arrange un aller-retour pour 120 roupies et nous demande expressément de ne pas en parler à un couple d'italiens qui ont, malheureusement pour eux, payé leur ticket plus cher. "Business is business". Maxime se met notre rabatteur dans la poche en proposant à une Israélienne de se joindre à nous. 2 indiens complètent notre taxi. En voiture Simone !


Une trentaine de kilomètres plus loin, nouveau scandale. Des sacripans profitent de l'événement pour se faire quelques sous en obligeant les arrivants à laisser leur sac à une consigne tout en grattant 50 roupies. Malins nous sommes d'avoir lu le Lonely Planet avant, nous n'avions que nos bananes bien cachées sous nos T-shirts. Le cinéma de la femme italienne outrée et les insultes dans sa langue maternelle valaient le détour ("Vafanculo" pour les trilingues).


1km de marche. Pas d'attente. Les touristes étant considérés comme VIP. Nous voilà enfin installés sur nos chaises en plastique dans un amphithéâtre bourré de spectateurs en tout genre (mais surtout indiens), équipés de tout l'attirail du supporter de base (drapeaux, casquettes, maquillage et éventails) aux couleur de leur beau pays.


La musique bat son plein, on se croirait presque en boîte de nuit. Un groupe de femmes déchaînées se déhanchent au centre du cirque et d'autres, le sourire jusqu'aux oreilles, effectuent des allers retours en courant avec des drapeaux (prêtés par l'armée pour l'occasion). L'ambiance est délirante. On se croirait à une finale de rugby (ou de foot comme vous voulez mais vous savez d'où on vient !). Les supporters chantent à tue-tête le poing levé. Un homme manque de se casser la voix dans un Pilou Pilou indien. L'euphorie nous gagne. C'est complètement dingue.


De l'autre côté du portail indien, derrière la grande barrière pakistanaise, le public du pays voisin est moins nombreux mais les cris nous parviennent dans les quelques moments de transition de notre côté.

Bientôt les tambours se réveillent et le chauffeur de salle, d'une voix puissante, nous lâche un cri qui dure... 40 secondes (chronométré par Maxime), et ce une bonne vingtaine de fois. Le but du jeu étant de crier plus longtemps que l'adversaire à chaque fois.

Les militaires arrivent enfin au centre de la scène, en synchronisation avec les soldats pakistanais de l'autre côté. Les costumes sont superbes, rouge et beige chez les indiens et bleu foncé pour les pakistanais, certains portent des turbans surmontés d'un éventail tel une crête de coq (voir photo plus tard on a une mauvaise connexion Wi-Fi...).


Le show commence et les soldats mettent le feu dans les tribunes à coup de jetés de jambes jusqu'au front et de mouvements millimétrés (mieux que le French cancan et Michael Jackson) destinés à en mettre plein la vue aux rivaux. Claquements de talons, moulinets d'épée et contractions de biscotos sur fond de musique rythmée rend le public hystérique. De notre point de vue, c'est réellement stupéfiant.

Les portes sont ouvertes avec poigne et fracas et un soldat de chaque pays se lance dans un jeu de vitesse pour détacher les cordes des drapeaux qui dominent la frontière. Après moultes lancés de corde ("Je lance plus haut que toi."/ "Non c'est moi"), nous assistons enfin au clou du spectacle, à savoir la descente des drapeaux, cette fois ci, à la même vitesse. Après un serrage de mains tonique, les portes sont refermées sous un tonnerre d'applaudissements et les militaires se permettent quelques petites photos avec les patriotes surexcités.


Symbole de paix ? Symbole de rivalité ? Nous nous sommes posé la question de la légitimité de cette cérémonie. Après nous être renseignés, les indiens nous confirment que le but est bien d'étaler sa puissance tout en coopérant avec le Pakistan. Le côté exagéré du spectacle est plutôt destiné à satisfaire la foule et créer du business autour de ce rituel.


Il faut savoir que cette cérémonie a lieu tous les soirs avant le coucher du soleil depuis maintenant 60 ans c'est à dire depuis la Partition de l'Inde lors du retrait des Britanniques en 1947.


Nous repartons donc en taxi avec notre groupe et proposons à l'Israelienne avec laquelle nous avions sympathisé, de venir partager un Thali avec nous. Demain, nous partons vers le Ladakh et la fraîcheur des montagnes...une longue route nous attend !


A très vite :)

Les Bob'trotteurs